En hommage à Gabriel Péri fusillé par les nazis sous le gouvernement Pétain en 1941.
Et s’il était à refaire
Je referais ce chemin
Une voix monte des fers
Et parle des lendemains
On dit que dans sa cellule
Deux hommes cette nuit-là
Lui murmuraient Capitule
De cette vie es-tu las
Tu peux vivre tu peux vivre
Tu peux vivre comme nous
Dis le mot qui te délivre
Et tu peux vivre à genoux
Et s’il était à refaire
Je referais ce chemin
La voix qui monte des fers
Parle pour les lendemains
Rien qu’un mot la porte cède
S’ouvre et tu sors Rien qu’un mot
Le bourreau se dépossède
Sésame Finis tes maux
Rien qu’un mot rien qu’un mensonge
Pour transformer ton destin
Songe songe songe songe
À la douceur des matins
Et si c’était à refaire
Je referais ce chemin
La voix qui monte des fers
Parle aux hommes de demain
J’ai dit tout ce qu’on peut dire
L’exemple du Roi Henri
Un cheval pour mon empire
Une messe pour Paris
Rien à faire Alors qu’ils partent
Sur lui retombe son sang
C’était son unique carte
Périsse cet innocent
Et si c’était à refaire
Referait- il ce chemin
La voix qui monte des fers
Dit Je le ferai demain
Je meurs et France demeure
Mon amour et mon refus
Ô mes amis si je meurs
Vous saurez pourquoi ce fut
Ils sont venus pour le prendre
Ils parlent en allemand
L’un traduit Veux- tu te rendre
Il répète calmement
Et si c’était à refaire
Je referais ce chemin
Sous vos coups chargé de fers
Que chantent les lendemains
Il chantait lui sous les balles
Des mots sanglant est levé
D’une seconde rafale
Il a fallu l’achever
Une autre chanson française*
À ses lèvres est montée
Finissant la Marseillaise
Pour toute l’humanité.
Louis Aragon
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* L’Internationale
Louis Aragon – sous le pseudonyme de Jacques Destaing- écrivit ce poème, en hommage à Gabriel Péri, fusillé par les nazis sous le gouvernement Pétain, en 1941.
L’ouvrage, L’Honneur des Poètes fut publié le 14 juillet 1943, aux Editions de Minuit de Pierre Seghers.
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