Religion et Haute couture

2 juillet 2008

En 1662, Agnès dans  » l’Ecole des femmes « * s’entend dire par Arnolphe :  » Votre sexe n’est là que pour la dépendance :/ Du côté de la barbe est la toute-puissance.  » Presque trois cent cinquante ans après, ce sont les dogmes monothéistes qui ressassent la même tirade. 

 Que ce soit par la peur, par la soumission, et/ou par l’interdiction,  la Haute couture religieuse (celle qui vient d’en-Haut) impose ses modes aux (jeunes) femmes.

Pour la mode la plus délicate et la plus intime, le défilé a lieu dans les hôpitaux ou les cliniques privées ; c’est l’hyménoplastie de 100 à 3000 euros **. Cela concerne pour une large part des femmes musulmanes, mais aussi des femmes   » juives, hindoues, catholiques…  »

La sociologue Dounia Bouzar***   affirme que  » Les jeunes filles musulmanes nées en France ont appris à lire et à dire  » je « . Elles savent vérifier dans le Coran les textes et le sens des textes. En l’occurence, la plupart des jeunes femmes savent très bien que la virginité ne fait pas partie des commandements de l’islam.  »

Alors pourquoi Leïla, amoureuse de Younès qui  a basculé dans l’extrémisme  a-t-elle aussi peur de n’être plus vierge avant son mariage (tout comme a eu peur la jeune Lilloise) ? C’est parce que Younès sachant lire le Coran, ne sait pas  « que la virginité ne fait pas partie des commandements de l’islam. » Il n’est  pas prêt. Son sentiment amoureux (tout comme celui de son homologue lillois) s’arrête là où commence son « honneur ». Parce que l’intégrisme est prévisible, Leïla a anticipé « les risques…de perdre celui qu’elle aime  » et  subi  l’hymenoplastie, « secret qui se porte seule. A vie. Et devant dieu, comme le redoutent souvent les croyantes comme Leïla. » Double peine.

Une autre mode est (ré) apparue aussi, celle du « voile islamique « .  Après une vingtaine d’ années d’atermoiements regrettables,  le foulard islamique  a été enfin reconnu en 2004 comme  un signe religieux inacceptable à l’école laïque [ Loi du 15 mars 2004 ].

Puis, toujours plus et impérativement, » le modèle burqa «  a été imposé aux femmes, telle Faiza M.**** par des maris obéissant aux ordres extrémistes de la mode salafiste ; modèle avec lequel la femme peut encore voir, à défaut de respirer, d’entendre et de parler normalement – car avec le modèle « femme d’imam« , la femme ensevelie n’a plus d’yeux …que pour pleurer. L’avis du Conseil d’Etat du 27 juin 2008 est un signal fort pour leur dire qu’elles ont le droit d’avoir leur identité, avec leur visage et leur chevelure, qu’elles sont en France les égales des hommes, avec leur visage et leur barbe.

Enfin,  pour la prochaine collection de printemps de  la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, ***** il faut savoir que  «  celui qui confère le sacrement de l’ordre à une femme, ainsi que la femme ayant reçu l’ordre sacré, encourent automatiquement l’excommunication latae sententiae  » par conséquent, les modèles pour dames de  soutanes noires, violettes, rouges ou … blanche, avec  calottes en soie moirée assorties, resteront encore dans les cartons de l’atelier de couture du Vatican.

Les siècles défilent, dieu ne reconnaît toujours pas les femmes comme égales des hommes.

                                     

* Molière

** Mon hymen son honneur d’Elise Vincent, en italique les paroles de Leïla (prénom d’emprunt) Le Monde 20 juin 2008

*** Voilées ou non, les jeunes musulmanes s’émancipent de Bernard Gorce // la-croix.com 2 juin 2008

**** cf l’article Une Marocaine en burqa se voit refuser la nationalité française de Stéphanie le Bars Le Monde 11.07.08 – et l’excellent dessin de Brito  Droits de l’homme Le Monde 16.07.08  p.13 ; voir aussi ma note Se souvient-on de ce portrait de femme ? 03.11.07 et le site Ni Putes Ni Soumises

***** dans son  » décret du 19 décembre 2007   concernant le délit d’ordination d’une femme… afin de protéger la nature et la validité du sacrement de l’ordre sacré  » 29 mai 2008 // radiovaticana.org/fr

                                                                         

Le temps de mûrir

Ce qui choque désormais le plus dans les dogmes religieux qu’homo sapiens a su produire, dès l’aube de son humanité, ce sont les insupportables incohérences morales, les démesures criminelles, les étouffoirs intellectuels, qui fondent durablement les pouvoirs politiques.

En effet, tout se passe encore comme si ces dogmes n’étaient établis que pour s’assurer de l’obéissance sociale des  fidèles croyants, tandis que leurs   chefs spirituels  accèdent   habilement au pouvoir … pour s’y maintenir le plus longtemps possible… par la grâce de Dieu, évidemment.

Les  commandements, les  lois, les  principes – qui pour chaque dogme émanent du  divin  et sont donc sacré(e)s – ne fondent en fait qu’ injustices, inégalités, oppressions, soumissions millénaires de droit divin. Base des pouvoirs temporels, ces fondements religieux des puissances politiques, s’accompagnent parfois de miettes de compassion ou autre charité

De l’hindouisme avec les castes, du christianisme, de l’islamisme et du judaïsme avec leurs incessantes  guerres de religion , il se pourrait que l’humanité soit lasse, même épuisée par un tel acharnement à l’opprimer et à la détruire.

Et si l’humanité avait mûri ? Si la soi-disante quête de  la pureté de l’homme religieux  ne  pétrifiait plus les intelligences ?

Si l’autre, croyant de l’autre religion – ou athée – ou agnostique – et même (sic) une femme – n’était plus jugé(e)  impie ou impur(e), mais tout simplement respecté(e) comme un être humain, à égalité de droits ?

Si l’humanité, par sagesse et irrépressible besoin de justice, avait enfin rédigé des droits universels bien supérieurs  à ceux que les  dieux  avaient  inspirés  jusqu’à présent … S’il était venu le temps de mûrir ? …