Sigmund Freud constaterait tout comme nous l’incroyable emprise « des univers oniriques * » des jeux vidéo sur les jeunes cerveaux. Les enfants sont fascinés et en redemandent tellement que la certitude de profits colossaux exacerbe l’imagination des adultes concepteurs. On voit ainsi leurs talents faire merveille pour parvenir à transformer nos paisibles bambins en patients (sic) pour le plus grand bonheur de modernes psychanalystes eux-mêmes » accros » aux jeux vidéo.
Les symptômes sont là. Fatigués, abrutis, grognons, opposants ou agressifs, les enfants ne réussissent plus à travailler à l’école, du coup ils se réfugient encore plus dans le virtuel. Bref, la société marchande les dote d’un véritable handicap socioculturel pour leur évolution et leur réussite scolaire. Qu’à cela ne tienne, la science (ou magie ?) psychanalytique partant du postulat que » l’inconscient dans notre société est devenu très visuel « , invente le soin par le jeu vidéo. D’où l’étrange raisonnement qui consiste à nous faire croire que d’imposer à l’enfant toujours plus de sollicitations audio-visuelles lui » permet de projeter à l’extérieur des choses qui sont difficiles à dire. »
Finis le calme, les dessins, les jeux, les jouets, place à l’écran géant et aux bruits. Plus besoin d’avoir ses propres rêves, l’enfant vit et agit dans les cauchemars virtuels des adultes grâce à « toutes les consoles de jeux disponibles sur le marché « . Il accumule sans fin des images et des sons, refait mécaniquement toujours les mêmes gestes. Ce soin par le jeu video ne serait-il pas un acharnement virtuel lui aussi, vers une véritable dépendance ?
Avec l’illusion érigée en théorie que ces jeux vidéo-là correspondraient justement à l’univers émotionnel de cet enfant-là et lui serviraient d’exutoire. Avec l’illusion que toujours plus d’images animées excessivement lumineuses et sonores, induisant une incroyable surexcitation, permettraient à l’enfant de se retrouver lui-même, dans sa propre vie et en sécurité affective, avec ses propres sensations et ses vrais sentiments.
En effet, il faut bien se poser la question : comment un enfant déjà fragilisé, réussira-t-il à se guérir aussi de l’emprise du virtuel, à échapper à sa tyrannie, pour que sa vie réelle toute simple en famille, à l’école, lui apparaisse à nouveau comme une belle aventure, sa belle aventure ?
* citations de Michael Stora, psychanalyste, extraites de l’article de Séverine Fiévet : Le virtuel pour soigner les enfants en difficulté Le Monde 05.03.2008
cf ma note L’exploit : dix jours sans télé ni jeux vidéo du 24 mai 2008
Concernant les 12-25 ans voir Dans la spirale des jeux vidéo (documentaire d’Heide Breitel rediffusé sur Arte le 20.06.2008).