En rappel à M. Peillon et aux candidats à la présidentielle de 2017

Note du 8 juillet 2012 mise en avant le 16 .12 2016 et précisée (!) le 21.12.2016

Ou quand M. Peillon,
[
candidat in extremis à la Primaire du PS « hollandais » 
pour être élu président de la République en 2017 , mais plus sûrement pour affaiblir (toujours selon la méthode « hollandaise »)  M. Valls], 
était ministre refondateur de l’Éducation nationale, en 2012.

 Le dossier  adressé  à M. Peillon et au « comité de pilotage »  ♦ n’a  reçu aucune réponse ni par courrier,  ni a fortiori, par le vote d’une loi  juste … M. Peillon  n’ayant retenu dans sa refondation factice de l’école primaire, que le péri-scolaire sous le  nom de « rythmes scolaires (sic) » à la charge des municipalités,   Mme Vallaud-Belkacem  s’étant chargée  de ruiner les contenus des programmes du collège. 

« Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale,

En ce temps de « Refondation de l’École de la République », exercice obligé à chaque nouveau gouvernement depuis la première consultation nationale organisée par M. Savary – premier ministre de l’Éducation nationale de M. Mitterrand en 1981 et après les passages au ministère de MM. Lang et Jospin, on souhaite que cette énième concertation soit utile pour en finir avec le « toujours moins d’école »,  pour en finir avec une formation où un professeur frais émoulu de l’IUFM de Créteil, ne déclarerait  plus «hyper réac la morale !» quand la violence est partout.
Il est temps de retrouver  le sens fondamental de la  mission d’enseignant et suivant l’exemple de nos admirables instituteurs de la laïque  depuis la fin du XIX ème siècle : donner les moyens de  la langue française et des sciences à l’éveil de l’intelligence  de tou(te)s les futur(e)s citoyen(ne)s.

Sous la III ème République, l’école primaire publique était ouverte cinq jours par semaine et 223 jours par an, elle n’ouvre plus que quatre jours par semaine et 140 jours par an [soit l’équivalent d’une année scolaire en moins]-  laissant les élèves devant la télévision, les jeux vidéo, les sites glauques de la toile, les publicités incessantes etcC’est cette carence d’école qui constitue désormais le véritable « handicap socio-culturel ».

Il y a cinq ans,  j’ai écrit une lettre au président Sarkozy. Comme elle me semble toujours d’actualité, je la verse au dossier des membres du « comité de pilotage » qui se chargeront du rapport « Refondons l’École »  à remettre en octobre 2012.
     L’Histoire de l’école publique et laïque s’écrit, mais sa plume est  paresseuse quand il s’agit de  faire progresser du  XX ème au  XXI ème siècle, les droits au savoir du peuple. »
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         Extraits d’une lettre* adressée à M. Sarkozy, Président de la République, lundi 1er octobre 2007

« Monsieur le Président,

J’ai l’honneur de vous écrire avec une totale liberté de ton, hors langue de bois (…)

 Comme il faut parler franc  « l’avenir de nos enfants  » n’est pas seulement entre les mains de chacun d’entre nous, éducateurs , il est aussi et surtout … entre les mains des décideurs politiques, représentants de la Nation tout entière.

Ce qui me fait dire que tous les dysfonctionnements observés actuellement sont les effets d’une volonté politique aveugle aux problèmes de démocratisation, délibérément laxiste et se dotant d’incompétences multiformes à tous les niveaux de l’institution.

Comme je suppose que les enfants de ministres et de présidents sont accueillis, la plupart du temps dans l’enseignement privé catholique, tel M. Luc Ferry qui s’en était expliqué un jour, d’un ton badin, sur une chaîne de télévision publique, on comprend aisément que le signal d’alarme ne s’allume jamais dans leurs bureaux. Et pourtant…

Votre belle définition de notre mission :  « Aider l’intelligence, la sensibilité à s’épanouir, à trouver leur chemin, quoi de plus grand et de plus beau en effet ? Mais quoi de plus difficile aussi ? » fera l’unanimité. La nuance que j’apporterai sera pour   « Eduquer c’est chercher à concilier deux mouvements contraires  » car je ne vois rien de contradictoire entre  « celui qui porte à aider chaque enfant à trouver sa propre voie et celui qui pousse à lui inculquer ce que soi-même on croit juste, beau et vrai.

D’autant plus qu’il s’agit là, pour notre société d’un véritable enjeu vital de transmission de valeurs universelles, pour aider les jeunes à se construire, et à construire leur propre vie  hors du champ exclusif de la tyrannie de la culture commerciale (1).

Lorsque vous abordez  « notre modèle d’école républicaine  qui brasse toutes les origines, toutes les classes sociales, toutes les croyances », il me semble que vous embellissez le tableau, car les classes moyennes et moyennes supérieures ont depuis ces dernières décennies largement opté pour l’enseignement privé.

Sachant que les classes aisées n’avaient bien évidemment pas attendu Jules Ferry pour doter leurs enfants d’une éducation aussi soignée que possible,  « notre modèle d’école républicaine »   fut créé  pour les enfants du peuple, les fils de paysans, d’ouvriers et d’employés, afin de les sortir d’un analphabétisme incompatible avec l’essor du développement industriel et commercial de l’époque. Il s’agissait de fournir au patronat une main d’œuvre qualifiée, plus performante.

Ainsi  « notre modèle d’école républicaine …s’est affaibli », je dirais même qu’ il est bel et bien en panne, on se demande même s’il faut parler de  « modèle ».
♦ Comment notre école qui avait réussi une si belle ébauche d’accès aux savoirs fondamentaux pour tous, a-t-elle pu ensuite faillir à sa mission d’approfondissement des savoirs au collège ? … Q
uand on sait combien pour les couches privilégiées, ce parcours d’études jusqu’à 16 ans est simple et banal depuis des siècles.

La  conclusion que vous tirez de cet   « affaiblissement »  est  la suppression de la carte scolaire. Cela ne servira qu’à satisfaire les parents qui cherchent à fuir le   « modèle d’école républicaine » de leur quartier. C’est dire si dans certains quartiers ce modèle a perdu la cote ! Elle facilitera encore davantage la formation dans l’enseignement public de parcours scolaires d’excellence qui seraient l’apanage des seuls beaux et bons quartiers de centre ville. Ces   « bonnes écoles  » mériteraient le nom de  « zone où l’éducation est vraiment prioritaire – ZEVP « , car contrairement à leurs jumelles de banlieues et d’arrondissements  « modestes », elles correspondent parfaitement au  « modèle d’école républicaine », celui qui peut éduquer tous ses élèves jusqu’au meilleur niveau. C’est pourquoi je persiste à dire que cette mesure n’a aucun effet sur le fonctionnement pédagogique de l’école ni sur la réussite scolaire pour tous.

La réforme du collège – dit   « unique »(?)  ne devrait en aucun cas apparaître comme un   renoncement aux perspectives généreuses et démocratiques qu’avait ouvert le Plan Langevin – Wallon à la Libération.

 Ce serait désastreux car ce serait se suffire de fausses évidences pour en tirer de mauvaises conclusions. On retrouve là dans vos propos les trop fameuses   « différences de rythmes…de formes d’intelligence ».
De l’évidence qu’ aucun enfant n’est pareil à un autre, on a depuis ces quatre dernières décennies, voulu nous faire croire qu’en fait, certains étaient surtout  « moins doués », et d’étonnants psychosociologues ont voulu nous convaincre que c’était – toujours- les enfants des classes « modestes  » ; cette discrimination étant accompagnée de théorisations plus   « savantes »   les unes que les autre qui conditionnèrent toujours plus les esprits.

Ainsi c’était prouvé, l’échec des collégiens était bien dû à leur faible intelligence et/ou à la « classe socioculturelle » de leurs parents, non au collège et/ou à l’école primaire laquelle, de circulaires en décrets ministériels inadéquats avait été écartée stupidement de sa mission primordiale d’enseignement des savoirs fondamentaux.

On a vu poindre insidieusement l’ombre de la régression démocratique avec l’invention du nom dévalorisant de  « massification ». Parler d’enseignement secondaire en France revient depuis quelques années à gloser sans fin sur la   « massification » dans le collège -dit unique. Cela ferait rire s’il ne s’agissait de  « nos enfants  » et de l’avenir de notre société.

Faut-il donc continuer à instiller le doute sur  l’intelligence des élèves, en déclarant que tous nos collégiens ne peuvent suivre un cursus secondaire ? Que nous n’atteignions pas tous le niveau de savoirs d’un(e) astronome… ou d’un(e) biologiste, je le conçois aisément, mais dire que le niveau de 3ème de collège – à condition que l’on sache lire et que l’on ait envie d’apprendre – n’est pas accessible à tous, serait une véritable imposture éducative et morale.  

En tant que Président de la V ème République, vous avez là un véritable défi à relever : faire que l’enseignement secondaire public égale en qualité celui dispensé dans les collèges   « privilégiés « , dans ces lieux où   « la culture humaniste[ ne] s’étiole [pas] et où   « la culture scientifique [ne] régresse [pas] ».
 
Il s’agit bien pour ce « temps de la refondation  » de ne plus se tromper d’objectif et de donner la même vraie culture générale à tous les adolescents de notre pays, et non pas seulement au petit nombre. Il s’agit d’avancer dans la conquête citoyenne des droits à l’égalité, de faire enfin, plus et mieux que les pionniers de la III ème.

L’avenir de l’enseignement public ne saurait en effet se satisfaire du simple accueil  « charitable » ponctuel et forcément partial de quelques lycéens de banlieues à l’Institut des Sciences Politiques de Paris.

Ce  « temps de la refondation » devrait, il me semble, avoir pour base la formation des professeurs et l’excellence de leur travail … car enfin, jusqu’à quand voudra-t-on nous faire croire que pour faire un bon professeur, il suffirait d’un an avec des formateurs, éminents universitaires certes, mais qui n’ont jamais enseigné aux 3-16 ans, alors que pour faire un bon artisan, il faut de trois à cinq ans avec des maîtres qui excellent dans leurs métiers ?
Une vraie formation de l’apprenti-professeur devrait se faire sur une période d’au moins deux ans, en alternance théorie-pratique, sachant que le plus précieux savoir-faire sera acquis en présence des élèves, avec l’exemple et les conseils de l’enseignant-maître d’apprentissage, lequel donnera de plus en plus d’initiatives à l’apprenti durant la seconde année. On ne leur demandera pas de faire le Tour de France comme aux Compagnons, mais  le tour des écoles de la ville et/ou du canton sera des plus enrichissants.
C’est ainsi que celle ou celui qui a enseigné en centre ville enseignera de la même façon, avec la même attente exigeante, dans une école rurale ou une école de banlieue.
Les cinq premières années d’enseignement devraient permettre aux professeurs débutants de retrouver régulièrement leurs tuteurs pour se perfectionner, venir à bout de leurs difficultés et se cultiver encore et toujours.

La nouvelle fraîche de la suppression du samedi matin me conforte dans ce que j’avais repéré … comme étant la tendance lourde   « au toujours moins d’école ». Avec la mauvaise foi qui n’appartient qu’au discours officiel, on dit que cela améliore les rythmes scolaires des élèves alors que l’emploi du temps scolaire sur quatre jours est particulièrement bousculé.

La diminution du temps scolaire pour les élèves est lourde de conséquences et n’exonère en rien les présidents, les ministres et les enseignants de leurs responsabilités éducatives et culturelles pour le plus grand nombre – c’est-à-dire pour tous ceux qui remplaceront l’école par la télévision, les jeux vidéo et le grignotage, le mercredi et le samedi.
Pour ceux-là, au manque d’école s’ajoutera le manque de temps forts d’acquisition culturelle et artistique : fréquentation des bibliothèques, des médiathèques, des musées, des ateliers d’artisans, des entreprises aux techniques innovantes, des lieux de recherche scientifique, fréquentation des écoles de musique, d’arts plastiques, de théâtre et de danse,  rencontres avec les élus, les sorties au théâtre, au concert,  l’apprentissage   « vivant » de langues dans des activités ludiques (jeux de société – chansons), culturelles (théâtre), ou sportives, les échanges avec les jeunes européens etc.

Je suis en plein accord avec votre conclusion : « A nous de reprendre le fil qui court depuis l’humanisme de la Renaissance jusqu’à l’école de Jules Ferry en passant par le projet des Lumières. »
A cette nuance près que  « le fait religieux » , s’il est abordé en histoire des civilisations, a une place telle dans notre histoire nationale – la monarchie de Droit Divin, les guerres de religion, l’Inquisition et ses bûchers jusqu’aux privilèges du clergé avant la Révolution de 1789  etc.– que l’on ne peut dans une perspective laïque chèrement acquise, le survaloriser.
Si d’après vous,  « le spirituel, le sacré accompagnent de toute éternité l’aventure humaine. S’ils sont aux sources de toutes les civilisations », je pense que les dieux sont les fruits de l’imagination créatrice de mythes d’Homo sapiens, et que notre humanité aurait un bien plus bel avenir, si ces dieux n’empêchaient pas la fraternité… 

En vous remerciant de l’attention … je vous prie de croire, Monsieur le Président … »

Michèle Pacory-Poncet

 * en réponse à sa « lettre aux éducateurs » de septembre 2007
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  ♦   9 août 2012 /  Le service du courrier du Ministère de l’Éducation nationale n’a pas trouvé le cabinet de M. Peillon  et  son  «comité de pilotage de la  Refondation de l’École de la République».
Il a refusé mes lettres adressées à Mme  Mons
  sociologue et à M. Christian Forestier IGEN et me les a retournées copieusement chiffonnées comme sorties de la poubelle.
L’histoire ne  dit pas si le
 service  susdit a remis les lettres à Mme Colombani journaliste au magazine Elle  et à M. Bonneau président de la région Centre — ou si elles sont simplement passées à  la choucrouteuse… Je penche pour la deuxième solution

Voir la fine étude de Dominique PASQUIER : Cultures lycéennes. La tyrannie de la majorité Autrement février 2005  / Voir aussi l’excellent travail de Catherine ROBERT professeur de philosophie au lycée Le Corbusier d’Aubervilliers qui fait de la culture un vrai festin pour ses élèves…

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note du 8 juillet 2012

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