Le mauvais goût du « ARTE WebSlam »

           

Cela serait dommage de finir 2011 sur le mauvais goût du « ARTE  WebSlam » 😉

Heureusement, après  « ARTE  WebSlam » nous attend le régal de la poésie, comme après le « rap * » il nous reste quelques belles chansons à écouter, et après les graffitis,  il nous reste encore des œuvres d’art à admirer.
Slam, rap et graffitis** qui nous viennent d’Outre Atlantique ont été récupérés côté français par les  médias commerciaux qui en tirent d’énormes profits , mais ce drôle de paquet cadeau n’offre guère  la culture de  l’intelligence et de la sensibilité , « le supplément d’âme ».

Par un hasard curieux, en ce jour de Saint Sylvestre, j’ai  donc découvert sur Arte.tv  le texte d’un gagnant***  du « ARTE   WebSlam » 2008-2010,  qui s’intitulait Le prince charmant. 
              Par ma barbe ! disent l’ingénue et le poireau,  mais quel était alors le niveau des textes des perdants  ?   😉

Les fautes d’orthographe, de grammaire, les erreurs de syntaxe le disputent aux expressions grosssières … bref, ce prince charmant n’a guère de charme. Il faut dire aussi qu’il recherche une « meuf  pour la sortir de je ne sais pas quel merde (sic) dans laquelle elle s’est mise (resic)» … et trouve quelques rimes fameuses  :   avant  charmant / main –  nain /  gentleman – âne /   dulcinée – recalé /  clubbing – parking /  discothèque –  baskets / etc.

Pour faire passer ce  mauvais goût du «ARTE WebSlam »,  j’ai trouvé  par un autre hasard curieux  les mots du plaisir, de l’ivresse, de la jeunesse et de l’amour, dans une poésie toute simple   … Mais un doute me taraude : le jury  2008-2010 du « ARTE   WebSlam » aurait-il retenu ce candidat 😉 ?

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 Il s’agit de  … Victor Hugo,  Volume de vers. La Poésie de la rue  ( Reliquat des Chansons des rues et des bois)

            LES TUILERIES
 Chanson des deux barbares 

Nous sommes deux drôles,
Aux larges épaules,
Deux joyeux bandits,
Sachant rire et battre,
Mangeant comme quatre,
Buvant comme dix.

Quand, vidant les litres,
Nous cognons aux vitres
De l’estaminet,
Le bourgeois difforme
Tremble en uniforme
Sous son gros bonnet.

Nous vivons. En somme,
On est honnête homme,
On n’est pas mouchard.
On va le dimanche
Avec Lise ou Blanche
Dîner chez Richard.

On les mène à Pâques,
Barrière Saint-Jacques,
Souper au Chat Vert,
On dévore, on aime,
On boit, on a même
Un plat de dessert !


La vie est diverse.
Nous bravons l’averse
Qui mouille nos peaux ;
Toujours en ribotes,
Ayant peu de bottes
Et point de chapeaux.

Nous avons l’ivresse,
L’amour, la jeunesse,
L’éclair dans les yeux,
Des poings effroyables ;
Nous sommes des diables,
Nous sommes des dieux !

Nos deux seigneuries
Vont aux Tuileries
Flâner volontiers,
Et dire des choses
Aux servantes roses
Sous les marronniers.

Sous les ombres vertes
Des rampes désertes
Nous errons le soir,
L’eau fuit, les toits fument,
Les lustres s’allument
Dans le château noir.

Notre âme recueille
Ce que dit la feuille
A la fin du jour,
L’air que chante un gnome,
Et, place Vendôme,
Le bruit du tambour.

Les blanches statues
Assez peu vêtues
Découvrent leur sein,
Et nous font des signes
Dont rêvent les cygnes
Sur le grand bassin.

……
La terrasse est brune.
Pendant que la lune
L’emplit de clarté,
D’ombre et de mensonges,
Nous faisons des songes
Pour la liberté.
                                             19 avril 1847
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* cf. la note  Larsen, une pensée trop « haschée », trop « rappée »

** cf. Sur les murs  l’ignorance
 ***  Laurent Étienne

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